Sur la comète

On a tracé nos plans
À la pointe sèche

On s’entraînait
Pour le passage de la comète

On a crissé des dents
Sur les pains de glace

On ne savait pas
Qu’on aurait du fragment

Quand elle passerait
Avec son aplomb de migrateur

Au-dessus des messes
Et des ouvrages ardents

Ce n’est pas si grave
On a laissé des miettes

Sur le glacier
Du monde durable

On a eu nos aigreurs
Et nos toux de moteur

Dans l’appareil enténébré
Des jours ouvrables

On a bien compris l’apesanteur
Je ne sais plus dans quel secteur

On n’a jamais changé de masse
Seulement d’intensité

On s’essayait à la plongée
Et au vol habité

On s’était fatigué des plans
On optait pour l’eau froide

On s’entraînait
Pour le passage de la comète

Et quand elle vint
Dans les bois de sapins

Nous avions l’étrave à la chasse
Quelque part en quête

De la furie, de la muscade
Du dernier hydrocarbure

On plantait dans les grumes
Nos dents de brise-glace

Et la chair fraîche des arbres
Affolait les résines

La comète fit une fronce
Aux sangs mous des sèves

Nous eûmes à peine le temps
De recoiffer les cimes

A peine le temps de laisser aux morsures
La faible médecine de nos excuses

Et les arbres alarmés par notre bêtise
S’épousseter de leur mystérieuse tendresse

Nos talons d’os battants
À peine le temps

De gagner l’orbe de la comète
Avec bien d’autres nocturnes.

2 septembre 2005, Douarnenez