Mange-boucle

En bas, une table, un type dans nos âges
Se cure l’oreille en bras de chemise

Contre-plongée sombre, très lente
De nombreuses rampes d’escalier convergent

Une issue de secours tire-bouchonne l’arrière-plan
Remonte une à une les personnes

L’affluence est moindre aux heures de nuit
Mais ce récent bureau déjà ne ferme plus

La table doit provenir d’un théâtre
Le type doit provenir d’un théâtre

Aussi sonore, l’escalier doit provenir d’un lycée
Ces plaignants viennent d’en ville

Par des descentes de cave personnelles
Volées de marches un rien grasses

Il n’est pas question d’expliquer
Comment s’emboîtent autant de bulles

Mais le fait est que chaque plaignant
Noyaute un certain volume étanche

Et quoique les trajets convergent
S’interpénètrent et s’englobent

Tous ces blocs d’air amniotique
Tendent à rester familiers, bien compacts

Du moins dans les premiers temps
De la descente, qui est courte

Car il est vrai qu’autour de la table
L’atmosphère s’étale, inhabitée

Et quoiqu’absolument fatale
Aux spires dont on vient s’extraire

Sa formule, brevetée, est sans incidence
Sur l’intimité du plaignant

À cet étage crucial, l’Agence entretient
Toute l’absorption nécessaire

Et puis deux couples d’oiseaux sérieux chassent
La moindre spore de ritournelles

Il y a autour de la table une belle aura
De beau trou noir et tout y passe

Le type entend douze ou trente plaintes, rote
Décroche : un autre plaignant prend sa place.

(An Ividic, 26 septembre 2008, 10h55, 1er juillet 2010, 0h12, Keraudren, K, 17 janvier 2021)