A la gare

Non
Je ne m’ennuie jamais
J’observe
Je suis assis sur un banc
J’attends qu’un wagon passe
Rien ne presse
Les jours naissent pour rien
Mais d’ennui non
Jamais
J’attends
Plus ou moins
C’est un wagon
C’est une gare
C’est une pieuvre
Elle renifle
Elle gambade
Sur le quai
Puis change
D’idée
Sans prévenir je veux dire
Qu’est ce que j’imaginais ?
Ça clapote un peu
Je suis à la gare
Assis
C’est un bathyscaphe ici
Ça bourdonne
L’air est tout saturé
De petites racines increvables
Je pense à cette femme
Depuis combien de jours
De… bon sang !
Où est passé l’ordre de mission ?!
On traverse une couche
De menus poissons
Je pense à elle
Qui passe tout entière
Par le hublot du fond
Sans foutre de flotte partout
Pourquoi
Ne descendrait-elle pas du wagon
Tout juste maintenant ?
Un deux
Je passe la serpillière
Un, deux
Circuits de touché
À cause de la pression
Les fuites s’allument partout
C’est toute une affaire
D’aller vider les seaux
Mais d’ennui non
Jamais
La loco grince
Sur les rails
Je suis assis
Au bout du banc
J’observe à nouveau
Les femmes
Ont l’air d’avoir été couturées
Les hommes
Ont l’air
D’habiter sous terre
Un trou chacun
Et la vaste épaisseur
Ça passe au jaune
Sur le quai
La pieuvre explose
Il y a
Ces affiches de publicité
Pleines de soifs amusantes
J’observe ma tête
Amusée
Sur une vitre qui passe
J’ai meilleure mine
De jour en jour
Je m’ennuie
De moins en moins.

Sans date, Lons le Saunier